Après l'observation, fin 2009, des premiers neutrinos dans les détecteurs « proches » de l'expérience T2K dédiée à l'étude de l'oscillation des neutrinos, les physiciens, parmi lesquels ceux du CNRS/IN2P3 et du CEA, ont détecté le 24 février dernier les premiers neutrinos dans le détecteur « lointain » Super-Kamiokande. Dernière étape dans la mise en route de l'expérience T2K qui marque le démarrage de la prise de données physiques.
T2K étudie le mécanisme d'oscillation de neutrinos muons produits à JPARC (1) sur la côte est du Japon et détectés près de la côte ouest, 295 kilomètres plus loin, dans le détecteur Super-Kamiokande. L'expérience T2K comprend essentiellement trois composantes bien distinctes : l'accélérateur de protons de JPARC qui produisent les neutrinos sur une cible de carbone, un ensemble de détecteurs « proches » situés à 280 mètres du point de production des neutrinos et le détecteur lointain Super-Kamiokande. C'est dans ce détecteur, une cuve d'eau cylindrique de 40 mètres de diamètre et 40 mètres de hauteur située 1000 mètres sous terre, qu'a été observé pour la première fois un neutrino produit à JPARC. Des mesures utilisant un GPS certifient que le neutrino identifié par le détecteur Super-Kamiokande a bel et bien été produit sur la côte est du Japon, à 295 kilomètres.
Le détecteur géant Super-Kamiokande avait déjà été utilisé pour étudier les neutrinos « naturels » provenant du soleil et surtout ceux produits par les rayons cosmiques dans la haute atmosphère. Les résultats de ces études avaient valu à M. Koshiba le prix Nobel 2002 de physique.
L'observation le 24 février du premier événement neutrino dans Super-Kamiokande constitue une étape majeure dans la mise en route de l'expérience T2K et ouvre une période très excitante pour la physique des neutrinos. La première période de prise de données physiques a débuté en février et devrait s'achever en juin 2010. Les premiers résultats sont attendus avec impatience par la communauté des physiciens des hautes énergies.
La figure ci-dessous montre le premier événement de T2K mesuré dans le détecteur Super-Kamiokande. Les points correspondent à la détection de lumière Tcherenkov par des photomultiplicateurs localisés sur les parois de la cuve géante. Les deux cercles indiquent la production d'un méson « pi zéro » qui s'est désintégré en deux photons de lumière. Cet événement est parfaitement synchrone avec la détection, par les détecteurs proches, du neutrino produit à JPARC. La production du « pi zéro » est le résultat de l'interaction du neutrino muon incident avec un proton de l'eau de la cuve.
La collaboration T2K regroupe 508 physiciens de 62 institutions réparties dans 12 pays tels que le Japon, des pays européens ou les États-Unis. Les équipes de l'IN2P3 (2) ont participé à la construction des détecteurs proches et analysent l'ensemble des données de T2K.
Le premier événement de T2K mesuré dans le détecteur Super-Kamiokande à 295 km du point de production du faisceau. Les points correspondent à la détection de lumière Tcherenkov par des photomultiplicateurs.
(1) Japan Proton Accelerator Research Complex
(2) Laboratoire de physique nucléaire et de hautes énergies - LPNHE (CNRS / Université Paris 6 Pierre et Marie Curie / Université Paris 7 Denis Diderot), Institut de physique nucléaire de Lyon - IPNL (CNRS / Université Claude Bernard Lyon 1), Laboratoire Leprince-Ringuet - LLR (CNRS / École Polytechnique).
Pour en savoir plus :
- Communiqué de presse de KEK (Laboratoire japonais de physique des hautes énergies) : http://www.kek.jp/intra-e/press/2010/T2KfirstEvent.html
- Communiqué de l’IN2P3 (Institut National de Physique Nucléaire et de Physique des Particules) : http://www.in2p3.fr/recherche/nouvelles_scientifiques/2010/5_T2K.htm
- Contact chercheur : Michel Gonin : mgonin à in2p3.fr - 01 69 33 55 54